A – LES CHEMINS ANCIENS A NANGEVILLE
Au fil des annees, le trace, l’utilisation et l’importance des chemins sur le territoire de Nangeville a evolue. L’analyse de differentes sources (photos, cadastres, archives, ..) permet de reconstituer les traces de chemins anciens. Beaucoup ont aujourd’hui disparu, mais plusieurs demeurent.
Le petit bois de l’orme semble avoir ete un carrefour local important, probablement deja a l’epoque gallo-romaine ou anterieurement, avant meme que les bourgs de Nangeville et de Champmotteux ne soient constitues.
On remarque aussi une certaine accumulation de batiments gallo-romains, reperes par photos aeriennes, sur un axe nord-sud qui va de la region de Maisse jusqu’a Cesarville-Dossainville, en passant par le bois de l’orme et Nangeville. Cet axe semble aboutir a la grande voie romaine de Chartres a Sens qui passait a Sermaises, puis tout pres de Vievy (commune de Cesarville-Dossainville), a 3km au sud de Nangeville, bien visible sur les photos aeriennes et dont plusieurs chemins actuels epousent encore le trace.
B – LE PETIT BOIS DE L’ORME : UN CARREFOUR IMPORTANT A L’EPOQUE ANTIQUE ET AU MOYEN-AGE ?
L’analyse des cadastres et photos aeriennes permet de reveler l’importance du petit bois de l’orme comme point de communication, sans doute deja a une epoque tres reculee.
A l’epoque du cadastre de 1835 (et encore jusqu’au remembrement des annees 1950), il y avait la un veritable carrefour en forme de triangle de 40 metres de cote, avec l’orme au centre (voir photo ci-dessous) et 6 directions :
- Vers l’est, le chemin de Boigneville qui existe encore et n’a pas ete modifie. Il est probablement tres ancien (epoque gallo-romaine ou anterieure ?)
- Le chemin de Maisse au nord-est, dont l’ancien trace est tres visible grace au dessin des parcelles. Il existait a l’epoque du cadastre napoleonien (et portait le nom de Chemin de St Mathurin sur le territoire de Champmotteux), et a disparu probablement vers 1860-1870 lorsque la route Champmotteux – Nangeville a ete reamenagee et est devenue un axe plus important.
- Le chemin de Valpuiseaux – Mespuits vers le nord-ouest, qui evite Champmotteux a l’ouest. Il a ete supprime dans sa partie nangevilloise lors du remembrement des annees 1950, mais est bien encore visible sur certaines photos aeriennes.
- Le chemin de Mainvilliers au sud-ouest, qui a disparu avec le remembrement des annees 1950 jusqu’au croisement du chemin de la Grouette, mais qui existe toujours au dela
- Le chemin vers Champmotteux au nord qui rejoignait celui de Maisse une centaine de metres au nord de l’orme. Ce chemin, deja visible sur le cadastre napoleonien, a ete trace dans sa partie nangevilloise en coupant des parcelles existant anterieurement. Ainsi il est tres probable qu’il y a plusieurs siecles il n’existait pas et qu’on allait de Champmotteux a Nangeville en rejoignant d’abord le chemin de Maisse.
- Et bien sur, plein sud, le chemin vers Nangeville. Il existait en 1831, et son trace a ete a ete reamenage en ligne droite dans les annees 1860-1870
Parmi les 6 directions qui convergaient vers l’orme, 4 (vers Maisse, Boigneville, Valpuiseaux et Mainvillers) evitent les bourgs de Champmotteux et Nangeville. Cela peut indiquer (et c’est meme tres probable) qu’elles existaient avant la naissance de ces deux bourgs, et donc avant les IXe ou Xe siecles lorsque la topographie actuelle de la Beauce, avec un regroupement de l’habitat, s’est mise en place. En effet, si ces chemins avaient ete traces alors que les deux bourgs existaient deja, on les aurait probablement fait passer a travers ceux-ci.
Un autre indice de l’anciennete de ces voies est la presence de fermes gauloises et gallo-romaines a proximite d’un axe nord-sud (Maisse – Nangeville et Nangeville – Oinville) et vers l’est (de l’orme a Boigneville) – voir la photo – :
- La ferme du Ravoir sur le territoire de Nangeville, situee a quelques metres du chemin de Boigneville, de meme que celle des Hauts de Nangeville (sur le territoire de Boigneville) a 150 metres de ce chemin
- Le petit temple et les batiments situes a 200 metres au sud de l’orme, tout pres du chemin de Nangeville. A proximite du petit temple un fosse ou une cloture antique, visible sur les photos, est presque parrallele au chemin de l’orme a Mainvilliers : etaient-ils contemporains ?
- Deux villas sur le territoire de Champmotteux, proches du chemin de Maisse (chemin de St Mathurin)
- Deux fermes au sud du bourg de Nangeville situees pres des chemins (les Hautes Bornes a 150 metres au sud du village, et la tres grande villa a peristyle de la rue basse a Oinville – Bellesauve)
Deux autres curiosites a noter egalement :
- Le chemin de Nangeville a D’Huison-Longueville : encore aujourd’ hui existe sur la commune D’Huison-Longueville (situee assez loin, a 20km au nord de Nangeville) une rue denommee « chemin de Nangeville ». L’analyse des cadastres napoleoniens montre qu’il existait sous ce nom en 1813, se prolongant vers le sud, en partie dans les bois, pour rejoindre Valpuiseaux puis le carrefour de l’orme a Nangeville en passant a l’ouest de Champmotteux. Pourquoi etait-ce denommee « chemin de Nangeville » et non par exemple « chemin de Valpuiseaux » la commune la plus proche, et plus importante aujlourd’hui que Nangeville ? Est-ce justement en raison de l’importance du carrefour de l’orme ?
- Le chemin de St Mathurin a Nangeville : sur le cadastre napoleonien de Nangeville (1835), on remarque que le chemin de Maisse, aujourd’hui disparu est nomme aussi « chemin de Saint Mathurin ». Cette denomination n’apparait pas sur le cadastre de Champmotteux realise en 1813. La voie romaine Chartres-Sens qui traversait Sermaises et Vievy etait, elle aussi, nommee « chemin de Saint Mathurin » car elle desservait le pelerinage de Saint Mathurin a Larchant. Le chemin de Nangeville a Maisse etait ainsi probablement, pour les pelerins venant du nord, un moyen de rejoindre directement cette voie vers Larchant
Pour conclure, une deduction logique, bien que sans preuve absolue, est l’existence d’un carrefour important a l’emplacement de l’orme a l’epoque antique (vers 100-200 apres JC), a proximite du petit temple, situe a 200m, et qui attirait sans doute des pelerins, lorsque l’habitat etait tres disperse, et Nangeville ou Champmotteux encore inexistants ou constitues seulement de fermes isolees. Depuis ce carrefour, on pouvait aussi rejoindre directement la voie gallo-romaine ouest-est de Chartres a Sens qui passait pres a Vievy, a 3 kilometres au sud du bourg actuel de Nangeville.
Ce carrefour de l’orme existait peut-etre deja bien avant l’epoque gallo-romaine. Mais il reste a trouver des indices.
C – LES AUTRES CHEMINS
Plusieurs autres chemins anciens, bien visibles sur le cadastre napoleonien, existent toujours et n’ont pas ete touches par le remembrement des annees 1950.:
Vers l’est :
- La route de Nangeville a Gollainville
- Le chemin de Nangeville a Prinvaux
Vers l’ouest
- Le chemin de la Grouette qui dessert Brouy
Vers le sud
- La route vers Oinville est aussi ancienne, proche de plusieurs etablissements gallo-romains, mais son trace a ete rectifie, au moins legerement, probablement dans les annees 1860-1870
En revanche le chemin direct de Nangeville vers Boigneville, et celui, direct aussi, de Nangeville vers Mainvilliers ont disparu au remembrement des annees 1950.
En 1836, seules quatre voies sont classees par arrete prefectoral comme « chemin vicinal » : vers Champmotteux (encore existant, mais remanie), vers Bellesauve (disparu deja avant le remembrement), vers Boigneville (en direct depuis Nangeville : disparu avant le remembrement) et vers Bellesauve (aussi disparu avant le remembrement). Curieusement, ces trois derniers chemins, consideres comme importants en 1836, etaient assez recents car ils coupaient des parcelles comme on le voit sur le cadastre de 1835. Ils ont disparu, alors que les chemins de Gollainville ou de Oinvlle, classes comme chemin de moindre importance en 1836, sont aujourd’hui les routes principales pour l’acces au village, avec celle de Champmotteux.
ANNEXE : SOURCES D’INFORMATIONS
Pour tenter de decrypter l’evolution des chemins, on dispose de plusieurs sources :
- Les cartes modernes (IGN, etc..) qui presentent la situation actuelle des chemins et routes
- Les cartes d’etat major du XIXe siecle
- Les photos aeriennes de differentes epoques : pour Nangeville et les communes voisines, les plus anciennes photos aeriennes disponibles datent de 1945 et sont accessibles en ligne sur le site de l’IGN. De nombreux cliches ont ete pris depuis par l’IGN. Un historique de photos Google prises depuis une vingtaine d’annees est egalement accessible en ligne. Ce type de photos aide a reperer, au moins partiellement, les traces de chemins disparus (impacts sur la vegetation, impact du gel, etc….)
- Le cadastre actuel (accessible en ligne sur France Cadastre) qui permet de distinguer des coherences dans les limites de parcelles et de deviner des traces de chemins plus anciens
- Les cadastres anciens (pour Nangeville, le cadastre napoleonien de 1835, qui decrit precisements chemins et parcelles; pour les communes voisines, les cadastres egalement dates de 1830-1840, ou un peu plus anciens – vers 1813 – pour Champmotteux et les communes du sud de l’Essonne, comme Boigneville et Gironville), qui permettent a la fois de reperer certains chemins anciens qui existaient a l’epoque et ont disparu depuis, mais aussi – comme pour le cadastre actuel, mais en gommant presque 200 ans de transformations ulterieures – de distinguer les limites coherentes de parcelles et de deviner les traces de chemins plus anciens qui n’existaient deja plus en 1835.
Photos aeriennes et cadastres actuels ou anciens permettent aussi de reperer les chemins qui ont ete traces en coupant des parcelles existantes et sont ainsi a l’evidence plus recents que les plus anciens des decoupages connus de parcelles
- Les voies romaines des environs de Nangeville, decrites notamment sur le site Vici.org et dans le livre de Jean Soyer (les Voies antiques de l’Orleanais). Une seule voie est signalee a proximite immediate de Nangeville, mais elle est d’importance : la voie ouest – est de Chartres a Sens (ou « chemin de St Mathurin ») qui passait a 3 kilometres au sud du village, entre Cesarville et Bleville, apres avoir traverse Sermaises.
- Les plans de villages de la fin du XVIIIe siecle (annees 1780) qui n’existent que pour certaines communes voisines (Champmotteux et Orveau) et permettent de recouper quelques informations sur les principaux chemins
- Les traces (murs, clotures, fosses) des fermes anciennes (gauloises, gallo-romaines, haut moyen-age) identifiees par photographie aerienne et analysees sur le site AERBA (Atlas des etablissements ruraux de la Beauce antique). Lorsque ces traces de construction sont proches d’un chemin identifie, cela peut donner une indice d’anciennete.
Dans l’analyse des plans et photos, on peut distinguer quelques categories de chemins :
- Les chemins qui relient directement le village actuel aux bourgs voisins les plus proches (Champmotteux, Gollainville, Bleville, Oinville, Mainvilliers, Brouy, Gandevilliers)
- Les chemins qui traversent le territoire de Nangeville pour relier des agglomerations ou bourgs plus distants, sans necessairement traverser le bourg de Nangeville lui-meme, et ayant en quelque sorte une vocation regionale
- Et bien sur, les chemins tres locaux s’achevant en cul-de-sac, qui donnent seulement un acces aux champs, sans vocation a relier les bourgs
Dans le cadastre napoleonien et comme aujourd’hui, on remarque des chemins qui ont ete traces en coupant de nombreuses parcelles existantes, et qui sont par le fait meme plus recents que ces parcelles.
Dans le cas de Nangeville, le remembrement du debut des annees 1950 a transforme profondement la topographie des parcelles et le trace de plusieurs chemins importants.