En 1497, l’amiral de Graville, propriétaire au moins en partie de la Tour Carrée à Nangeville, cede plusieurs fermes a la maîtrise de la collégiale Notre-Dame de Milly qu’il avait instituée 2 ans auparavant. Cette maîtrise fonctionnera jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, associée à la ferme de Nangeville, qui sera vendue en 1795 comme bien national.
Voici quelques etapes et informations sur l’histoire du domaine de la maitrise a Nangeville :
Mars 1497
L’amiral de Graville alloue a la fondation et a l’entretien de la maitrise d’enfants de choeur a Milly plusieurs fermes/metairies de Nangeville :
- Le fief Saint Michau, exploite par Tiersselin, et semble-t-il ancienne propriete de Jean Grison (revenus annuels : 33 + 11 = 44 livres tournois par an)
- Une demi-metairie exploitee par Jean Gillet (revenus : 12 livres par an)
- Une autre demi-metairie exploitee par la veuve de Jean Lemaire, descendant probable de Pierre de Nangeville (revenus : 8 livres par an)
- Et d’autres revenus de terres que possede l’amiral de Graville a Nangeville (9 livres)
D’apres les actes de donation, les revenus annuels de ces fermes semblent etre de l’ordre d’une trentaine de muids de ble et d’avoine “mesure de Pithiviers”. Le muid d’Orleans correspondait a l’epoque a 12 “mines”, soit environ 300 kilos (6 quintaux) . En prenant l’hypothese – probable – que la mesure de Pithiviers est la meme que celle d’Orleans, un calcul de base avec des hypotheses de rendement autour de 10 quintaux a l’hectare et d’un loyer verse au propriétaire de l’ordre de 15 a 25% du revenu des terres, on note que les fermes cedees couvrent des surfaces cumulees importantes : jusqu’a 100 hectares ou plus. C’est bien la taille que l’on retrouve a la fin du XVIIIeme lorsque cette propriete de l’eglise est nationalisee et revendue a des personnes privees (108 hectares) : les terres possedees par la maitrise a Nangeville etaient restees probablement inchangees pendant 300 ans.
Par ailleurs, toujours d’apres le document de donation, les revenus annuels en valeur des fermes sont de l’ordre de 73 livres tournois, ce qui representait en 1497 le salaire annuel de 3 a 4 manoeuvres, ou un peu plus d’une fois et demie celui d’un maître-artisan.
Source : Archives de l’Essonne – acte de Fondation 4 mars 1497 et inventaire de 1777 apres deces de l’abbe Patton
En 1761
Un bail pour l’exploitation d’une ferme du domaine de la maitrise a Nangeville est passe par la maitrise de Milly au profit de Jules Chevalier, laboureur a Bleville (commune de Cesarville)
En 1777
Dans l’inventaire realise apres le deces de l’abbe Paton, maître du choeur de Notre Dame de Milly a l’epoque, on remarque qu’un bail pour la ferme de la maitrise a Nangeville a ete passe le 17 juin 1770 au profit de Thomas Chauvet et sa femme.
Source : Archives de l’Essonne – acte de Fondation 4 mars 1497 et inventaire de 1777 apres deces de l’abbe Patton
Le 3 thermidor an 3 (21 juillet 1795)
La ferme de Nangeville devenue bien national, faisant partie du domaine de la maitrise de Milly, est adjugee au district de Pithiviers pour 24000 francs a Antoine Nicolas Lemaistre, Antoine Edmee Pichard et Valentin Huet. Dans la foulee Antoine Edmee Pichard et Valentin Huet abandonnent la ferme a Antoine Nicolas Lemaistre.
Ce passage entre des mains privees, 298 ans apres la donation de l’amiral de Graville a Notre Dame de Milly, est rappele dans les actes de vente ulterieurs de la ferme. Cependant le texte meme de l’adjudication en l’an 3 a probablement disparu dans l’incendie des archives d’Orleans en 1940.
Sans que cela soit precise dans les actes, Antoine Nicolas Lemaistre semble etre sculpteur-marbrier a Paris, au moins depuis 1774. A noter : le 9 germinal an 10 (30 mars 1802), a la demande d’un membre de sa famille, peu apres sa mort le 8 mars 1802. un inventaire des biens d’Antoine Nicolas Lemaistre est effectue. On n’y trouve pas d’allusion a la ferme de Nangeville vendue 3 ans plus tot.
Source : Archives nationales – Antoine Marie Boulard, notaire a a Paris; cote MC/ET/IV/361.
Le 7 floreal an 4 (26 avril 1796)
Apres l’adjudication, Antoine Nicolas Lemaistre est dechu de sa propriete par les autorites a Pithiviers, en raison d’un retard de paiement.
Le 15 thermidor an 6 (2 aout 1798)
Trois ans plus tard, le directoire executif le retablit definitivement dans sa propriete a Nangeville, ainsi que dans celle de la ferme des Essarts, bien national partie du domaine d’un hospice, qu’Antoine Nicolas Lemaistre avait egalement achetee. A cette epoque, l’exploitant de la ferme est, comme en 1770, le Nangevillois Chauvet.
Thomas Chauvet, ne en 1741, meurt le 23 fructidor an 6 (9 septembre 1798). Son pere, laboureur et marguillier, qui n’etait pas originaire de Nangeville ni resident dans le village s’etait marie a Milly : peut-etre etait-il en relation avec le responsable de la maitrise qui aurait fait beneficier son fils Thomas du bail a Nangeville ?
Le 2 nivose an 7 (22 decembre 1798)
Antoine Nicolas Lemaistre vend la ferme a Marie Emilie Moussier pour 24000 francs.
Source : archives nationale – Maitre Jean Vingtain, notaire a Paris; cote : MC/ET/V/869.
Marie-Emilie Moussier etait nee en 1771 a Vienne dans l’Isere et avait divorce d’avec Claude Thomas (dit de Thomas de St Didier) le 26 floreal an 3 (15 mai 1795). Elle residait a Paris l’annee de l’achat de la ferme, et beaucoup tard, en 1850, alors qu’elle habite Nancy, elle reconnait sa fille nee en 1804 (an XII).
En l’an IX (1802)
Dans l’etat des proprietes a Nangeville etabli pour les services fiscaux, “St Didier” (il s’agit sans aucun doute de Madame Moussier) est cite comme etant proprietaire d’une centaine d’hectares
Le 14 avril 1807
Lancement par Marie-Emilie d’une procedure de vente par adjudication de sa ferme de Nangeville. A cette epoque le bail semble etre au benefice de la veuve de Mr Chauvet (a confirmer).
Source : Archives nationales – Jean Bertrand, notaire a Paris; cote : MC/ET/IX/909.
Le 27 octobre 1807
Marie-Emilie Moussier (de St Didier) vend pour 67000 francs la ferme a deux freres, Justin et Maurice de St Leger, nes en 1771 et 1774, tous deux capitaines du genie.
Source : Archives Nationales – Jean Bertrand, notaire a Paris; cote : MC/ET/IX/917 (l’acte manque).
Deux jours plus tard, le 29 octobre 1807, Marie-Emilie Moussier (dite St Didier ou Thomas) leve une hypotheque a Pithiviers, sans doute grace aux fruits de la vente.
1812
La ferme est louee a la famille Huet depuis au moins 1812 (textes a retrouver)
1936
Vente de la ferme par la famille de St Leger a Joseph Lefebvre.
Quelques documents associes :
- Transcription de quelques elements du texte de la donation de fermes de Nangeville en 1497
- Premiere page du texte de donation de 1497 (recopie en 1777)
- Extrait de l’acte de vente de la ferme de la Maitrise a Mme Moussier (dite Thomas, dite de St Didier) en 1802
- Affiche preparee pour la vente aux encheres en 1807
- Extrait de l’acte d’adjudication aux freres Saint Leger en octobre 1807
- Note venant des archives de Roger Huet